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Novembre 2022

Employee adaptability to change at work


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A multidimensional, resource-based framework
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Van Dam, K.

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Van Dam, K. (2013). Employee adaptability to change at work: A multidimensional, resource-based framework. In S. Oreg, A. Michel, & R. By (Eds.), The Psychology of Organizational Change: Viewing Change from the Employee’s Perspective (pp. 123-142). Cambridge: Cambridge University Press.

Our opinion

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Un article déjà ancien (2013) mais assez complet pour se faire une idée de ce qui se cache derrière ces notions d’adaptabilité au travail.

Notre synthèse

Les organisations de travail changent continuellement : ces changements pèsent sur les employés et exigent de leur part de véritables capacités adaptatives.

Les capacités d’adaptation aux changements d’organisation du travail (job performance) constituent un enjeu si important qu’elles sont considérées par les DRH comme un troisième pilier de l’évaluation des capacités des employés, à côté de leur adaptation à la réalisation de la tâche technique (task performance), et de leur adaptation à la variation contextuelle de la demande (contextual performance) (Griffin, 2007).

Pour autant, on manque toujours de clarté sur ce que recouvre la notion. On a longtemps mélangé plusieurs mots pour décrire le concept : adaptation au changement, adaptation aux transitions, carrière adaptable, adaptabilité du leader, etc.

On l’utilise parfois aussi au négatif avec le concept de « non-adaptation », avec une forme d’index qui s’étendrait d’une super écoute et ouverture d’esprit des employés face aux changements d’organisation (employees’ openness) versus leur totale résistance au changement (resistance to change).

Enfin, plus récemment, la littérature sur la résilience a introduit d’autres mots comme le niveau d’adaptation à l’incertain ou à de nouvelles situations, mais sans reprendre explicitement l’adaptation au travail à faire (job performance).

Un point sur la littérature sur le concept d’adaptabilité

D’un point de vue conceptuel, il existe deux approches historiques de l’adaptabilité au travail : l’une « située », abordant le sujet en fonction des nouvelles conditions du travail à faire ici et maintenant, et se centrant sur les comportements et performances adaptatives pour ce nouvel environnement ; et l’autre « générique », parlant plutôt d’une capacité individuelle à « enacter » des comportements adaptatifs, en quelque sorte à « être adaptable ».

Ces deux approches, bien que différentes, comportent de nombreuses similarités.

Une première similarité renvoie au degré de « malléabilité » individuelle nécessaire et disponible pour s’adapter.

L’adaptabilité serait améliorable par la formation et l’expérience. La volonté et le plaisir d’apprendre sont des facteurs clés pour acquérir cette adaptabilité. Mais ces qualités générales d’acquisition de l’adaptabilité s’inscriraient aussi dans un maximum atteignable individuel. Les caractéristiques des personnes, comme le plaisir à se confronter à des situations nouvelles, le niveau de résistance au changement ou les habilités cognitives de chacun joueraient à la fois comme facilitateurs et comme butées à ce qu’il serait possible de développer et acquérir en matière d’apprentissage et de capacité d’adaptation.

Une seconde similarité est la posture fondamentalement proactive de l’adaptabilité.

Elle n’est jamais limitée à un ajustement réactif. Si on la limitait à cet ajustement, on tomberait vite dans une vision restreinte de l’adaptation. En effet, l’ajustement imposé n’assure en rien que cet ajustement se ferait avec un plaisir pris au travail (ce qui est inclus dans le concept d’adaptabilité). Plus important encore, l’ajustement serait surtout vu dans un seul sens (l’ajustement du travailleur) alors que l’adaptabilité est fondamentalement bijective — voire multijective — incluant une dimension malléable et changeable de l’environnement, en même temps que celle du travail et de la personne investie dans le travail.

Une troisième similarité tient à l’importance des caractéristiques individuelles dans l’adaptation.

Ces caractéristiques sont souvent utilisées comme prédicteurs de l’adaptabilité. Il s’agit essentiellement des capacités cognitives, du degré de conscience, d’ouverture d’esprit et de maîtrise de la situation, mais le détail de ces caractéristiques fait encore l’objet de polémiques.

Beaucoup y rajoutent la notion de ressources psychologiques disponibles, de « capital ou réservoir personnel », de capacité à mobiliser ces ressources en contexte. Cette littérature sur les ressources est ancienne. Elle avait été initiée dès la seconde guerre mondiale avec les études sur la résistance des combattants et prisonniers à des affections médicales (Grinker and Spiegel, 1945). Elle a largement été entretenue et élargie avec la notion de « psychologie positive », puis reprise par la vaste littérature sur la « résilience individuelle ». Dans toute cette littérature, les ressources individuelles sont largement liées à trois dimensions (Fugate, Kinicki & Ashforth, 2004 ; Ployhart & Bliese, 2006) :

  • la sphère cognitive (le degré d’optimisme notamment),
  • la sphère émotionnelle (les affects),
  • et les comportements positifs d’adaptation (coping behaviors).

Sur cette base, la définition à retenir de l’adaptabilité d’un employé pourrait être la suivante :

L’adaptabilité individuelle au travail fait référence au potentiel sous-jacent des employés ‒ lui-même fonction des ressources cognitives, affectives et comportementales mobilisables qui peuvent être investies ‒ pour s’adapter aux demandes de changements liés à la tâche, à l’environnement, à la profession, et/ou pour les anticiper efficacement.

Cette définition suggère que le concept d’adaptabilité des employés est pertinent dans de nombreuses situations différentes, y compris le changement organisationnel, la socialisation, la carrière, l’adaptabilité aux changements de travail et/ou aux situations de travail stressantes.
La définition suggère qu’il existe trois dimensions liées à l’adaptabilité, à savoir : l’adaptabilité cognitive, affective et comportementale (Fugate & al., 2004).

En mettant l’accent sur les ressources des individus, cette définition intègre une vision de l’adaptabilité façonnée par une combinaison de caractéristiques de stabilité et de malléabilité de ce qu’on est chacun prêt à changer.

Quel chemin pour améliorer l’adaptabilité ?

Cette section développe un cadre multidimensionnel incluant les trois dimensions de l’adaptabilité cognitive, affective et comportementale, et leurs ressources sous-jacentes.

Une première qualité recherchée chez les personnes pour s’adapter est leur conscience et interprétation de la situation, leur habileté à percevoir tout changement de contexte imprévu, à reconnaître les nouveaux éléments et leur possible caractère bizarre, à la fois dans le temps et dans l’espace.

Une seconde qualité est la réunion d’une flexibilité cognitive et d’une créativité suffisante (pour avoir de nouvelles idées et penser à des alternatives possibles en permanence, ainsi que d’une attention sélective pour se concentrer sur l’attente du bon stimulus et sa capture sensorielle sans se laisser distraire par les bruits de l’environnement.

Une troisième qualité est la capacité à positiver, une orientation positive de l’esprit (adaptative orientation) plutôt qu’une tentation d’abandon devant une situation incomprise ou complexe. Cette orientation positive croise et rappelle d’autres appellations comme l’optimisme, l’estime de soi, le contrôle de soi.

L’adaptation affective, émotionnelle et ses ressources

Les employés s’ajustent plus facilement s’ils sont dans une pensée positive. L’adaptabilité dépend à la fois de cette pensée positive et de la capacité à récupérer psychologiquement après un stress émotionnel. Les ressorts de ces capacités sont la résilience individuelle (Block & Kremen, 1996), les émotions positives (Ond, 2006) et la régulation émotionnelle (Gross, 2002).

La résilience renvoie typiquement à la capacité de récupération (bounce back) après des expériences émotionnelles négatives, des menaces ou la rencontre avec l’incertain. Mais on notera que l’idée même de résilience des individus a beaucoup évolué depuis le début, où elle a été définie comme une capacité relativement rare chez les humains (particulièrement exposés à des stress majeurs comme la guerre), jusqu’à aujourd’hui où elle est vue comme un état relativement banal touchant toute personne ayant à vivre dans une société moderne et stressante, société dont la forme et les caractéristiques sont par ailleurs des modulateurs externes de cette capacité résiliente. La résilience serait un facteur d’adaptation au changement, aux progrès et à la prise de responsabilités.

La capacité à développer des émotions positives s’associe à une flexibilité dans le travail et à un sentiment de bien-être. Elle s’associe souvent à des traits comme l’humour et l’optimisme. Elle permet, comme la résilience, de faire face efficacement à l’adversité. Les deux concepts sont aussi associés à une meilleure santé, notamment un meilleur état immunitaire et une meilleure récupération cardiovasculaire.

Et les deux concepts sont aussi très reliés à la régulation émotionnelle, cette capacité à montrer ou masquer ses propres émotions, à redistribuer son attention et à changer son interprétation de la situation.

Les comportements adaptatifs et leurs ressources

L’adaptation comportementale dépend de compétences sous-jacentes particulières de l’individu et particulièrement de la capacité à gérer ses ressources en contexte, mais avec un contexte et un environnement qui en retour facilitent ou non le déclenchement de ces comportements. Ces compétences sous-jacentes proactives vont de la capacité, en situation de blocage, à tenter des actions sur l’environnement à la gestion de l’incertain (savoir se requestionner et changer devant un nouvel environnement), aux comportements tolérants (savoir continuer à travailler malgré un environnement devenu défavorable).

Inversement, la tendance à la procrastination (attendre de voir les changements sans agir) et le déni (rester sur ses routines) sont le reflet de la mauvaise adaptation comportementale. Une part notable de la littérature sur les comportements adaptatifs se réfère aussi aux styles comportementaux de l’adaptation (coping styles), centrés sur le problème perçu, sur l’émotion ressentie ou sur l’évitement et le déni. De même, une autre part de la littérature parle de niveau de motivation en distinguant la motivation à se confronter à une situation qui va changer versus la motivation à éviter de rentrer dans une situation qui va changer (approach and avoidance motivation).

Rôle de l’adaptabilité des professionnels en temps de changement

Les caractéristiques des professionnels, telles que mentionnées précédemment, peuvent aider ou freiner le changement dans l’entreprise. Naturellement, les qualités à s’adapter des employés vont devoir être prises en compte – et évaluées – pour lancer de grands chantiers d’évolution des organisations et des nouveautés dans l’entreprise. La littérature montre que l’histoire de l’entreprise, et de ses succès ou échecs lors d’évolutions passées – notamment récentes –, influencera significativement les nouveaux changements en ayant façonné d’une certaine façon les traits adaptatifs et la capacité adaptative de sa population professionnelle. Plusieurs stratégies sont utilisées régulièrement pour aider à la conduite de changement :

  1. en arguant de la survie de l’entreprise associée à la transformation proposée (compétition, évolution du marché), mais dans ce cas avec un fort accompagnement de communication et de participation qui va rythmer la transformation attendue pour se l’approprier (y compris positivement pour les conditions de travail, contenu, salaires, etc.),
  2. en s’appuyant sur les professionnels les plus adaptatifs et sur les transformations déjà réussies de l’entreprise,
  3. foncsien renouvelant une partie du personnel et en recrutant des personnels aux traits nettement plus adaptatifs que ceux qui sont partis.